L’Europe, absente de la révision constitutionnelle française

Le Parlement français entame l’examen d’une révision de sa Loi fondamentale.
Force est de constater que l’appartenance de la France à l’Union européenne y tient une place inversement proportionnelle à celle qu’elle occupe dans l’espace public.
Il y aurait pourtant beaucoup à dire.

Alors qu’on reproche à « l’Europe d’être éloignée des citoyens », le Parlement ne serait-il pas le lieu le plus légitime ou l’Exécutif devrait rendre compte de sa politique européenne, avant et après les discussions avec nos partenaires? D’y tenir des débats publics et transparents?

L’on entend souvent évoquer la place des Parlements nationaux dans le processus normatif européen. Cette réforme ne serait-elle pas l’occasion de formaliser leur rôle, ce qui commence par une prise en compte plus systématique de la dimension européenne dans l’élaboration de la loi nationale et se termine par leur association plus directe dans la construction des règles européennes, plutôt que de seulement se contenter d’un droit d’alerte ou de saisine de la Cour de Justice européenne quant au respect du principe de solidarité?

Enfin, le Parlement français est le seul de l’Union, avec ceux de Chypre, du Luxembourg et de Malte à ne pas disposer de commissions européennes de plein exercice, permanentes et disposant de pouvoirs législatifs identiques aux autres commissions.

Faut-il y voir un désintérêt, une restriction, une interprétation frileuse de l’appartenance de la France aux institutions européennes puisque ce sont les seules commissions des Affaires étrangères des deux assemblées qui peuvent déposer des amendements au fond sur les textes européens, les traités et accords, l’élargissement et autres engagements européens? Qui seules peuvent être saisies pour avis de lois nationales ayant une dimension européenne?

Le Parlement français est bien en retard sur ses homologues européens et il est bien étonnant qu’un gouvernement aussi engagé en Europe derrière son Président de la République, n’ait pas pensé spontanément à donner un prolongement à ces « consultations citoyennes » destinées à écouter les Français. Quelle meilleure enceinte que la représentation nationale pour renforcer le lien démocratique entre la construction européenne et les citoyens!

De vraies commissions permanentes en charge des engagements européens de la France, dotées de pouvoirs législatifs réels, sont indispensables à la compréhension, la discussion, voire l’amélioration ou même la contestation des décisions européennes.
De plus fréquents débats parlementaires sur les sujets européens sont le préalable à de vrais échanges, sérieux, étayés, solides, sur des questions complexes qui sont bien plus politiques que diplomatiques et si souvent preuve d’une profonde ignorance des faits.

La Démocratie en Europe commence dans les Parlements. La démocratisation de l’Europe commence dans nos parlements. Encore un effort Messieurs les Français!

Jean-Dominique GIULIANI, Président de la Fondation Robert Schuman